Voici pourquoi les femmes sont au cœur de la lutte contre la COVID-19 au Cameroun
13 novembre 2020
Ce sont les femmes qui sont le plus exposées au risque de contamination par le coronavirus et qui supportent le plus lourd fardeau.
C'est une journée animée pour l’un des nombreux secteurs du marché de Yaoundé, la capitale du Cameroun.
Des marchands de rue vendent leurs produits sur de petits étals ou chariots : bananes, mangues, ananas, riz, manioc, plantain, légumes verts, entre autres. Parmi les clients, il y a des femmes en robe à motifs colorés venues acheter des produits pour préparer leurs plats préférés aux membres de la famille : ragoût de légumes, ragoût de nid d'abeille aux cacahuètes, aux épinards et aux légumes verts amers, en-cas subtilement sucrés à base de plantain et de pois chiches, par exemple. Les amis se retrouvent eux aussi au marché pour se raconter les dernières nouvelles.
Cette scène, autrefois anodine, est aujourd'hui synonyme de danger pour de nombreux Camerounais. La menace de la COVID-19 a changé la vie de ce lieu et du pays tout entier.
"Les marchés de plein air sont au carrefour de l'économie et de la culture camerounaises", expique Allegra Baiocchi, la Coordonnatrice résidente des Nations Unies au Cameroun. En effet, de par la diversité de sa nature et de sa population, le Cameroun est connu pour être en quelque sorte une Afrique en miniature. Cette diversité se retrouve dans les produits vendus sur les marchés et chez les personnes qui s’y croisent. "La diversité d'ici, la vie d’ici, c’est en partie ce qui rend les marchés si dynamiques. Mais c'est aussi ce qui les rend si vulnérables".
Des endroits comme celui-ci, où les gens sont physiquement très proches les uns des autres, sont des lieux potentiellement sensibles en termes de risque de propagation de la maladie. Le 6 mars, les autorités ont annoncé le premier cas de contamination à la COVID-19 dans le pays. Depuis, quelque 6.700 personnes ont été infectées dans les dix régions du pays et 200 personnes en sont décédées.
L’ONU au Cameroun a travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement pour juguler la transmission virale, en accentuant les efforts en direction des femmes. L’ONU a collaboré avec tout le monde, des chefs religieux âgés aux jeunes vivant avec le VIH, en passant par les vendeurs sur les marchés de plein air. Certains de ces groupes de population, en effet, sont le plus susceptibles de contracter, de transmettre, ou de prévenir le coronavirus.
"La COVID-19 peut causer des problèmes respiratoires et, dans les pires scénarios, entraîner la mort", reconnaît Bernadette, vendeuse sur le marché. Bernadette communique autour d’elle ce qu’elle a appris lors des sessions d’information organisées par ONU Femmes à l’attention de 200 marchands de rue de la capitale. ONU Femmes a en outre fourni à ces derniers des trousses d'hygiène comprenant du savon et des masques, ainsi que des parapluies pour les protéger d’un soleil de plomb. Lors de ces sessions, le médecin en chef de l’ONU au Cameroun a expliqué ce qu’était le coronavirus et répondu à toutes les questions qui lui ont été posées sur la pandémie.
"La COVID-19 fait maintenant partie de notre réalité", déplore Alex, vendeur de légumes sur le marché depuis presque quatre ans. "J'essaie d’éviter d’être contaminé en appliquant les gestes barrières. Je porte un masque, et quand je rentre à la maison, avant de dire bonjour à ma femme et à mes deux enfants, je me change et je prends une douche. L’ONU nous a aidés à jouer notre rôle pour aider à endiguer la propagation du virus".
"Les femmes et les filles sont le groupe le plus exposé aux répercussions économiques de la pandémie", indique Hind Jalal, Représentante d'ONU Femmes pour le Cameroun. "Les écoles et les centres de soins étant fermés, la pression supportée par les femmes pour qu'elles élèvent leurs enfants et s'occupent d’eux toute la journée est plus forte. De plus, comme les familles vivent très proches les unes des autres, les femmes sont davantage exposées au risque de subir des violences.
Lucy est l’une des autres vendeuses du marché. Elle vend des fruits et des légumes pour subvenir aux besoins de sa famille depuis que son mari a perdu son emploi. "J'ai deux enfants, mais depuis la mort de mes sœurs, c'est moi qui dois subvenir aux besoins de ses enfants", confie-t-elle. "Grâce à cette activité, j’ai de quoi nourrir tout ce monde".
Partout au Cameroun, des femmes comme Lucy travaillent chaque jour dans le secteur informel. Les statistiques du PNUD montrent que près de 83 % des emplois au Cameroun relèvent du secteur informel, un secteur qui n’offre que peu ou pas de protection aux travailleurs. Les femmes représentent 80% de la main-d'œuvre dans le secteur agricole, où les emplois sont souvent très éprouvants, impliquant de longues heures de travail et offrant peu de protection contre les pertes d'emplois ou les accidents.
En d'autres termes, alors que la population du pays est nourrie pour l’essentiel par des femmes, ce sont les femmes qui sont le plus exposées au risque de contamination par le coronavirus et qui supportent le plus lourd fardeau économique. De ce fait, leurs familles en souffrent elles aussi.
"Les femmes jouent un rôle vital dans l'économie des familles et du pays", affirme Allegra Baiocchi, Coordonnatrice résidente de l’ONU. "Elles jouent également un rôle fondamental pour la sensibilisation aux risques et la promotion de pratiques sûres au sein de leur communauté. C'est la raison pour laquelle l’ONU au Cameroun place les femmes et la sensibilisation aux questions de genre au centre de son action de lutte contre la COVID-19. Lorsque les femmes sont protégées et aidées, c'est le pays tout entier qui en recueille des bénéfices".
Écrit par
Emanuel Foukou
RCO
Chargé de l'information publique et des partenariats