Lutter contre l’insécurité alimentaire en favorisant la production de produits maraichers frais, variés et respectant les normes d’hygiène et de qualité nutritionnelle
La recrudescence des conflits armés dans les régions du Nord-ouest et Sud-ouest du Cameroun a entrainé des déplacements de centaines de milliers de personnes
La recrudescence des conflits armés dans les régions du Nord-ouest et Sud-ouest du Cameroun a entrainé des déplacements de centaines de milliers de personnes vers des villes environnantes. Ces mouvements ont eu une conséquence directe sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle des personnes déplacées internes (PDI) ainsi que sur les communautés d’accueil. L’insécurité a également entravé les mouvements de la population et a limité l’accès aux marchés, ce qui a rapidement entrainé l’épuisement des stocks alimentaires et a accru la vulnérabilité des populations et leur exposition à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle. La pandémie de COVID 19 a constitué un facteur aggravant, notamment en termes de déstabilisation des systèmes de production.
Dans un tel contexte, la promotion de systèmes agricoles et alimentaires plus adaptés au contexte est une nécessité. C’est ainsi que l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) conduit un projet d’appui à la production maraichère dans les zones péri-urbaines de Douala et Buea. Le projet vise la mise en place d’un système agricole plus adapté et plus efficace que le système qui préexistait avant la crise, et ainsi contribuer à l’amélioration de la sécurité alimentaire et nutritionnelle des ménages rendus vulnérables.
Ainsi le projet permet non seulement aux bénéficiaires d’avoir une alimentation saine et variée mais aussi d’acheminer les récoltes sur le marché environnant. Il bénéficie à vingt-quatre groupements de producteurs regroupant trois cent ménages agricoles vulnérables d’une taille moyenne de six individus par ménage. Ces bénéficiaires ont ainsi vu leurs capacités renforcées grâce à l’utilisation de l’approche champs écoles paysans[1]sur différents aspects ; notamment la maîtrise des itinéraires de bonnes pratiques agricoles en production maraichère et l’utilisation raisonnée des pesticides. Un accent particulier a été mis sur la sécurité sanitaire des aliments ainsi que la gestion des pertes post-récoltes à travers leurs transformations et leurs conditionnements. Grâce à cette formation, les ménages des villes de Buea et Douala peuvent trouver sur les marchés urbains une offre suffisante de produits maraichers frais, variés et respectant les normes minimales d’hygiène et de qualité nutritionnelle. La formation a également outillé les bénéficiaires à la constitution d’un panier de la ménagère équilibré, varié et visant la satisfaction des besoins nutritionnels de base.
John Kemancha et son épouse font partis de ceux ayant fui leur village Lebialem dans la région du Sud-Ouest pour se réfugier à Ndobo, localité de Bonabéri. « Nous étions obligés de partir pour sauver nos vies. Aujourd’hui j’héberge pratiquement tous les membres de ma famille et de ma belle-famille. Nous sommes au total dix-sept personnes à ma charge » explique John. Grace à l’appui accordé par la FAO, John peut désormais compter sur le potager qu’il cultive à quelques pas de son domicile pour se nourrir. On y retrouve des tomates, des gombos, du maïs, du manioc, des épinards de Ceylan ou « waterleaves », etc… Une partie des récoltes est consommée par John et sa famille, tandis que l’autre partie est envoyée vers le petit marché local pour être vendue. Les bénéfices de la vente lui permettent entre autres de s’acquitter du loyer de sa maison et des frais de scolarité de ses enfants.
Claude quant à lui fait partie des membres de la communauté d’accueil ayant abrité une dizaine de déplacés internes venant de la région du Sud-Ouest. Technicien agricole de formation, il vit de l’agriculture depuis plusieurs années. Marié et père de quatre enfants, la culture du piment est sa seule source de revenus pour subvenir aux besoins de sa famille. Il affirme que depuis la survenue de la crise, la demande en produits maraichers a pratiquement triplé. L’appui en intrants et la formation en bonnes pratiques agricoles à travers l'approche champs écoles paysan de la FAO lui permettent de produire plus et de mieux gérer son exploitation. « Aujourd’hui je produis quatre fois plus de piment qu’il y a 4 ans. J’achemine ma marchandise au marché Sandaga, un grand marché de vivres frais dans la ville de Douala. Toutes les formations que j’ai reçues de la FAO au moyen des champs écoles paysans me permettent aujourd’hui de former d’autres personnes qui sont majoritairement des personnes déplacées internes venant des zones en crises » indique Claude.
« Avec l’arrivée des personnes déplacées internes chez moi, le nombre de personnes à nourrir a considérablement augmenté. Les bénéfices issus des ventes de piment me permettent non seulement de m’occuper de ma famille, mais également d’acquérir des vivres afin de subvenir aux besoins alimentaires de base des personnes qui vivent sous mon toit » poursuit-il.
Le plan de réponse humanitaire de la FAO 2022[2] indique que près de 15% des ménages affectés par une mauvaise consommation alimentaire ont recours à des régimes à valeur nutritionnelle réduite, tombant sous le coup des mécanismes d'adaptation négatifs. Investir dans l'agriculture permet de plus en plus aux ménages vulnérables d’acquérir des moyens de se nourrir et de nourrir leurs communautés. En effet, l’agriculture maraichère est une agriculture à cycle court, à grande diversité d’espèces dotés d’une valeur marchande élevée. A terme, la FAO vise à travers ce projet la mise en place d’un système agricole plus adapté et plus efficace pour l’amélioration de la sécurité alimentaire et nutritionnelle dans les zones péri-urbaines de Buea et Douala.